Des missionnaires-narrateurs à contre-temps des sociétés qu'ils évangélisent
Mots-clés :
relation de voyage ; jésuite ; récollet ; Innu ; mi'kmaq ; traduction ; tempsRésumé
Lorsque les missionnaires français arrivent en Nouvelle-France au XVIIe siècle, ils rencontrent des populations indigènes à la culture et à l’imaginaire social très distincts des modèles européens, et ce premier contact est empreint d’une violence tant physique et culturelle qu’idéologique et symbolique. Le traitement lexical et narratif de l’expression autochtone du temps illustre le paradoxe d’un apprentissage de la part des missionnaires teintés de méconnaissance et d’incompréhension. Cet article vise à étudier la représentation déformée de la temporalité autochtone dans la Relation de la Nouvelle-France du père jésuite Paul Lejeune (1634) et la Nouvelle Relation de la Gaspésie du père récollet Chrestien Leclercq (1691). Après avoir envisagé quels sont les repères temporels (cycles lunaires et saisonniers) que les missionnaires identifient, l’analyse de la traduction et de la description de ces repères permettra de souligner que les retranscriptions des missionnaires-narrateurs oscillent entrefine compréhension, biais idéologique et dénégation. Le temps social cyclique paraît étranger aux hommes d’Église, imprégnés d’une vision historique linéaire et eschatologique. Alors même qu’ils en maîtrisent les vocables, ils n’en présentent qu’une simple image, sans en saisir les implications ontologiques et sociales, ou du moins, sans les rapporter à leurs lecteurs européens.
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